Les Moranes,
« guerriers de Lumière »
Les imanyat , grands villages spécifiques où résident les moranes durant plus de cinq ans, sont ni plus ni moins l’école traditionnelle des Maasaï.
Ils y apprennent les secrets d’un environnement plein de dangers, où il convient de vivre en se faisant respecter des lions, des léopards, des buffles et autres serpents extrêmement venimeux. Les « écoliers d’ Enk’Aï » apprennent à observer le mouvement des nuages et l’éclosion de certaines plantes, autant de signes précoces de l’imminence des pluies, d’une sécheresse ou de tout autre désastre naturel, détails précieux qui permettent aux anciens de prévoir la façon optimale dont ils devront utiliser les ressources.
Ce sont aussi les moranes qui repèrent et calculent les meilleures configurations possibles herbe-eau en périodes sèches, accompagnant les vaches lors de leurs migrations et traquant les animaux égarés. Durant leur initiation, les moranes y font l’expérience de l’esprit de corps et du partage, en respectant la préséance de la maturité individuelle.
Car le but est de faire l’apprentissage intérieur de la dualité inséparable, pour atteindre l’aînesse, transformés au point de devenir co-créateurs avec Enk’Aï, comme le proclame l’aphorisme : « Les Maasaï et la Déesse sont égaux ! »
Toutes ces années de vie commune pour apprendre à opérer comme dans la vie par paires, des mouvements de navette entre deux éléments complémentaires et non pas vus comme antagonistes. Chaque initié y fait également ce dur apprentissage en apprenant par l’expérience le comportement qu’il doit avoir avec ses compagnons d’âge.
Un comportement tout en équilibre et en sagesse où la familiarité la plus personnelle s’exprime à travers luttes, moqueries, chamailleries et insultes réciproques, tout en prenant soin de ne pas apparaître par trop arrogant ni condescendant pour respecter la pleine indépendance et la liberté de chacun.
C’est aussi dans les imanyat qu’émergent les leaders, les orateurs talentueux, les porte-parole qui, plus que quiconque, assument leurs qualités sans chercher à se rehausser ni à rabaisser. En résumé, endurci par les épreuves de son enfance et par la circoncision, le jeune guerrier est prêt à affronter le troisième niveau, celui de la maîtrise de SOI.
De même, si le guerrier est choisi comme amant préférentiel par une ou plusieurs fillettes auxquelles il fait des dons de perles de verre multicolores, et si les autres moranes lui reconnaissent un droit de priorité sur son amante, il doit partager ses faveurs avec au moins un compagnon. Il apprend ainsi à maîtriser ses instincts de possession et de jalousie, qui sont considérés comme les vices les plus pernicieux et les plus destructifs pour l’équilibre de la personne et de la société.